- INTERNATIONALISATION
- INTERNATIONALISATIONINTERNATIONALISATILimitation de la souveraineté territoriale d’un État au bénéfice de plusieurs États ou d’une organisation internationale. Afin de dénouer des situations difficiles, de neutraliser des points névralgiques, de protéger des zones stratégiques ou de mener à bien des travaux d’intérêt collectif, le procédé d’internationalisation a été maintes fois employé et a connu diverses fortunes. La limitation peut aller de la simple édiction de règles juridiques particulières qu’un État territorial s’engage, devant la communauté internationale, à faire respecter au transfert de la souveraineté à des organes internationaux. La procédure d’internationalisation a été appliquée à des territoires, à des villes ou à des voies fluviales ou maritimes. Sont intervenues notamment des procédures d’internationalisation avec transfert de souveraineté qui eurent pour objet la zone de Tanger (acte d’Algésiras de 1923), la ville de Dantzig (ville libre de 1919 à 1939) et le territoire de la Sarre (statut donné en 1919 lors du traité de Versailles et conservé jusqu’à 1935). Si les modalités d’application du statut international étaient chaque fois différentes, le principe qui les guide est demeuré constant: placés sous la protection et la garantie de la Société des Nations (Dantzig) ou même gouvernés par elle (la Sarre), ou encore administrés par plusieurs puissances (Tanger), ces «points chauds» se trouvaient à l’abri des rivalités et des convoitises. Une telle situation s’avérait toutefois précaire: la Sarre optait, par référendum, pour son retour à l’Allemagne en 1935; Dantzig était annexée à l’Allemagne en 1939, puis à la Pologne en 1945; quant à Tanger, la ville perdait son statut international en 1956, lors de l’abolition du protectorat français sur le Maroc. Le régime international de Trieste n’ayant jamais pu entrer en vigueur et celui de Jérusalem n’existant qu’à l’état de projet, il n’est actuellement de territoire internationalisé que celui de l’Antarctique. Encore est-ce un type d’internationalisation tout à fait particulier, puisque fondé sur la liberté absolue de recherche scientifique et sur l’interdiction de toute activité non pacifique (traité de Washington, 1er octobre 1959). Cependant, si les douze puissances signataires s’engagent à faire respecter ces principes, elles ne renoncent pas à d’éventuels droits de souveraineté; il s’agit donc là d’une internationalisation plus fonctionnelle que territoriale.Bien avant les territoires, les voies d’eau ont fait l’objet de statuts particuliers; pour des raisons allant de la simple commodité à la nécessité absolue (pays n’ayant pas de débouchés sur la mer, par exemple), il s’est vite avéré utile d’édicter des mesures permettant la liberté de passage sur certaines voies de communication maritimes ou fluviales. En ce qui concerne les fleuves, il faut remonter jusqu’à un décret du 16 novembre 1792 pour rencontrer la première «internationalisation»; de portée encore limitée, elle n’accorde le libre passage qu’aux États riverains et s’applique à l’Escaut, à la Meuse et au Rhin; le système évolue rapidement vers une internationalisation plus complète. Naturellement, il ne pouvait être question de priver un État de ses droits de souveraineté sur la portion de fleuve coulant sur son territoire; il était pourtant nécessaire, afin d’assurer le libre passage, d’attribuer quelques pouvoirs à un organisme international. C’est ce qu’entreprirent le Congrès de Vienne en 1815, puis la Conférence de la paix en 1919, suivie en 1921 de la Convention de Barcelone. Les «voies d’eau d’intérêt international» sont régies par deux principes: liberté de navigation et égalité de traitement. La gestion est assumée suivant les cas, soit individuellement par chaque riverain (Escaut, Nil, Amazone), soit régionalement par la communauté des riverains (Danube depuis 1947; Moselle, 1956), soit internationalement par une commission fluviale composée de riverains et de non-riverains (Congo, Rhin).Les problèmes posés par les canaux et les détroits sont plus importants encore, surtout lorsqu’ils font communiquer deux mers libres. Voies artificielles ou naturelles, ils restent soumis à la souveraineté de l’État territorial, ce dernier étant simplement chargé de faire respecter la liberté de navigation, au moins en temps de paix. Le principe reste souvent lettre morte (Suez, Panamá) et les États riverains ont, en fait, tout pouvoir. Il est à noter que la tentative de contrôle des détroits turcs (Bosphore et Dardanelles) par une commission internationale (1923) s’est soldée par un échec (accord de Montreux, 1936). Ainsi, malgré le puissant intérêt qu’il y aurait à ne pas laisser des voies de communication d’intérêt international ou des points stratégiques du globe sous le contrôle d’une seule puissance ou de plusieurs puissances d’intérêts convergents, peu de régimes d’internationalisation ont connu une existence effective et durable. Il est aisé de concevoir le peu d’empressement, sinon la mauvaise volonté, des États à laisser démembrer leur territoire et à sacrifier leur intérêt national au profit d’un intérêt dont le caractère réellement collectif n’est pas toujours établi.• 1845, repris 1902; de internationaliser♦ Action d'internationaliser; son résultat. L'internationalisation d'un conflit.internationalisationn. f. Action d'internationaliser; son résultat. L'internationalisation d'un conflit.⇒INTERNATIONALISATION, subst. fém.A. — Action de rendre international; résultat de cette action. Internationalisation d'un conflit. En même temps qu'agonise le mythe politique de l'Internationale, se produit une internationalisation sans précédent de la culture (MALRAUX, Conquér., 1928, p. 164). Une internationalisation des intérêts économiques, n'impliquerait nullement la suppression et la méconnaissance des particularités raciales ou géographiques (GIDE, Journal, 1933, p. 1179) :• La distinction des divers espaces économiques dissipe l'illusion d'une internationalisation effective et complète de la monnaie, et indique comment une internationalisation praticable peut être obtenue...PERROUX, Écon. XXe s., 1964, p. 135.B. — Administration d'un lieu par une autorité internationale. Internationalisation de Tanger, du canal de Suez. L'internationalisation du fleuve Rhin serait un autre facteur propice à la coopération en Europe occidentale (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 561).Prononc. : [
]. Étymol. et Hist. 1. 1845 « action d'internationaliser, de rendre international » (RICHARD); 2. 1959 « administration d'un lieu par une autorité internationale » (DE GAULLE, loc. cit.). Dér. de internationaliser; suff. -(a)tion. Bbg. QUEM. DDL t. 4, 5, 12, 15, 17.
internationalisation [ɛ̃tɛʀnasjɔnalizɑsjɔ̃] n. f.❖♦ Action d'internationaliser; résultat de cette action. || L'internationalisation du territoire de Trieste. || L'internationalisation d'un conflit.0 Il (le F. L. N.) est sûrement résolu en tout cas à ne pas laisser perdre la chance inespérée d'internationalisation (de la guerre d'Algérie) que lui a donné Sakiet.F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 35.
Encyclopédie Universelle. 2012.